I won't say I'm in love [R.]

April haussa un sourcil surprit au toast de Derek, mais choisit finalement de ne rien répondre et d’acquiescer d’un signe de tête. Ce n’était finalement pas une mauvaise idée, qu’ils ne soient pas encore lassés de l’éternelle pizza était finalement un réel exploit. Enfin, ils savaient tout deux que cette petite habitude n’était pas basée sur l’aliment lui-même ( même s’il était indispensable ) mais simplement le fait d’être ensembles. « Bénissons Dieu dans ce cas. » Un léger sourire aux lèvres, elle but une gorgée d’alcool et éclata de rire en voyant la tête qu’il avait à cet instant précis. Comme s’il la prenait pour une folle et qu’il venait d’avaler de l’eau de javel. En pire. « Ah oui, le coca … Maintenant que tu le dis … »

Il était quand même difficile après tout, et elle n’était pas barmaid. Les vieux loups de mer du port s’enfilaient bien whisky sur whisky, ce n’était pas non plus la mer à boire. Cela dit, elle n’aurait pas été capable, même elle, de boire ce truc immonde qui vous brûle la gorge. « Dites donc Monsieur Stoneham, ma gorge est autant humaine que la votre, et j’aime pas les petits pois. »

Son verre posé sur la table basse, elle le suivit des yeux alors qu’il se dirigeait vers la cuisine à la recherche de l’ingrédient mystère qui rendrait son verre buvable et se retourna, les coudes écartés de chaque côté du canapé, le menton posé sur ses mains. « Je n’ai encore tué personne je te signale. Enfin techniquement si, mais les gens arrivent tellement amochés que c’est pas de ma faute. » Il voulait partir de ce côté-là ? Pas de soucis. Elle savait très bien qu’il le faisait exprès, et qu’il savait qu’elle faisait son travail avec le plus grand professionnalisme qui soit. Disons qu’une fois chez elle, elle relâchait la pression, tout simplement.

« Parce que tu crois vraiment qu’il faut être barmen pour inventer des cocktails ? »

Un éclair de malice traversa les yeux clairs de la jeune femme, qui bondit par-dessus le dossier du canapé pour le rejoindre en trois enjambés. Se frayant un chemin à travers l’encadrement de la porte, elle commença a fouiller dans les placards que Derek venait d’ouvrir, tout en parlant « Les barmen ne font qui suivre des recettes après, rien ne t’interdit d’en faire toi-même. » Cinq, six bouteilles d’alcool et de jus de fruits se retrouvèrent bientôt sur la table, April fixée derrière elles, un large sourire aux lèvres.

« Vas y l’artiste, invente un cocktail de déluré. J’en fais un aussi, et celui qui a fait le meilleur paye sa prochain tournée. »

Continuant ses préparatifs, elle sortit toutes sortes d’ingrédients et d’ustensiles. Une fois qu’elle eu terminé, elle revint se poster devant lui, toujours aussi allègre : « Par contre, on y va à petites doses. Je suis de garde demain matin, alors pas de bêtises, promis ? »

« Si tu t’inquiètes de te retrouver au chômage parce qu’un boucher se croit capable de faire comme toi après avec regardé Nip/Tuc je te rassure, ça n’arrivera pas. » Il avait beau s’évertuer à essayer de lui faire comprendre que n’importe quel individu qui s’improvise préparateur de cocktails n’est pas forcément doué, elle ne voulait rien entendre. Quand elle avait une idée, elle la mettait en application. Un peu comme lorsqu’elle décide brusquement de sauter en parachute. Un sourcil haussé, les bras croisé, April regardait Derek droit dans les yeux, nullement intimidée par son petit numéro. « Peut être que tu dégaines comme lui mais dans le genre intimidant, il est plus doué que toi. Vraiment. D’ailleurs, je me demande encore comment t’avais réussit à te faire engager dans cette pub à la télé … »

April : 1, Derek :0. C’était tellement tentant de lui rappeler ce souvenir qu’il préférait laisser de côté, et puisqu’il s’agissait d’un défi, tous les coups étaient permis. Autant user des arguments qu’elle avait à sa disposition. « Tu viens jamais aux urgences, alors tu sais pas où je met les pansements. » Ah, la chirurgie plastique, elle ne pouvait s’empêcher d’y faire implicitement référence. Elle sauvait des vies, il arrangeait les riches femmes sur le déclin. Chacun son truc. Elle en profita d’ailleurs pour le fusiller du regard, bien que ce soit perdu d’avance : leur spécialité respective était un sujet de piques incessantes.

« A trois. » Une seconde, une seule seconde, elle resta sérieuse. Mais le regard tragique à l’extrême qu’arborait Derek la fit partir dans un fou rire incontrôlable qu’elle mit quelques instants à calmer. « Mémorable, je suis sûre que tu vas être mémorable. Mais pas assez pour faire mieux que moi, navrée. »

Réfléchissant à toute vitesse, elle se décida pour une mixture totalement improvisée. Autrement dit, un mélange de ce qu’elle aimait, et sans avoir la moindre idée de l’allure que le tout prendrait. Sans s’occuper le moins du monde de Derek qui semblait avoir décidé de refaire la décoration de son appartement, elle remplit un grand verre à moitié de jus d’orange, ajouta une dose de Martini, une autre de Vodka et termina par quelques morceaux de fruits qui se mélangèrent à l’étrange breuvage. Le tout ressemblait à un jus d’orange, en plus liquide. Et avec une odeur légèrement plus … alcoolisée. Néanmoins, elle était fière d’elle, et un sourire victorieux s’était imprimé sur son visage tandis qu’elle attendait que Derek termine. Sourire qui se mua en expression d’horreur en voyant l’état du tapis et de la table basse. « Je savais pas que tu savais pas te servir d’une bouteille … »

Septique, elle attrapa le verre que lui tendait son ami, et hésita une seconde. Il semblait au moins moitié plus alcoolisé que le sien, et elle n’arriva pas identifier ce qu’il avait utilisé. « Tu es sûr que c’est pas empoisonné ? » Grimaçante, elle lui adressa un regard désespéré puis en avala la moitié cul sec.

Bien mal lui en prit.

Le cocktail était tout sauf bon, agréable, comestible. Au contraire, elle ne sentait que le goût du whisky qu’elle ne supportait pas et qui lui brûlait la gorge comme jamais. C’était un fait, jamais elle n’avait bu quelque chose d’aussi immonde. Ses yeux s’ouvrirent en grand, et elle cru avoir avalé de l’eau de javel. Littéralement. « AAAAAAAAH » Se précipitant vers la cuisine, elle but un demi litre de lait frais pour faire passé la sensation de feu lui dévorant l’œsophage puis détala aussi sec vers la terrasse de son appartement. La bouche grande ouverte, elle avalait de grandes goulées d’air frais pour faire passer la sensation désagréable du cocktail.

« Si je ne te connaissais pas j’aurais juré que tu avais essayé de m’empoisonner .. » Clignant deux ou trois fois des yeux, April sentit les vapeurs de l’alcool trop vite bu lui monter à la tête. Elle n’aimait décidément pas le whisky. « Derek, j’ai la tête qui tourne … »