We could take a break {r}

« Bon allez vas-y, crache le morceau ! »

Lui lançant un regard de biais, Lorenzo attendait que sa sœur daigne lui dire pourquoi elle faisait mouche depuis le début de leur footing. Chez les Baretti, c’était devenu une habitude. Ils se levaient tous les matins assez tôt et partaient tous les deux pendant une bonne heure histoire de faire le tour du parc et de rentrer chez eux en faisant la course. Le perdant était de corvée ménage et non, Lorenzo ne gagnait pas à tous les coups. Il ne l’avait jamais réellement vu comme ça. Certes, cela arrivait à sa sœur de ne pas se sentir dans son assiette mais elle en faisait toujours part à son frère pour qu’ils puissent en discuter ensemble, histoire qu’elle se sente mieux. Quand l’un des deux ne va pas bien, ça se ressent immédiatement chez l’autre. C’est un peu être ça jumeau, être proche jusqu’à la limite de l’échange télépathique. Pourtant aujourd’hui, elle n’était pas vraiment prête à lui faire part de ses problèmes.

Courant côte à côté, dans un silence des plus mornes, Lorenzo essayait de sonder le moindre de ses regards, de ses mouvements voir même de ses prises de respirations. C'est vrai que depuis un certain temps il n'avait pas pris le temps de discuter ensemble, d'aller au restaurant comme ils en avaient pris l'habitude avant. Le peu qu'ils se voyait se résumait au footing du matin et au "bonne nuit" du soir. A vrai dire, entre son nouvel album, les concerts, le Crown et les moments partagés avec Jamie, il n'avait guère de temps à autre chose. Il avait peur que ce soit justement ce manque de temps qui soit la cause du problème.

« Anna arrête de parler sérieusement, j'arrive plus à en placer une ! » Naturellement, il se moquait d'elle vu que celle-ci gardait complètement le silence. Il accéléra un peu la cadence dans une ligne droite, pour venir se poster devant d'elle, courant à reculons. « Sérieusement, qu'est-ce qui ne va pas ? » Silence.

Il s'arrêta soudainement, la stoppant par la même occasion. Au diable le footing, sa sœur était plus importante que le seul moment ou il pouvait brûler les millions de calories ingurgités par l'énorme quantité de nourriture qu'il pouvait manger en une journée. Ça pouvait se compter en kilos parfois. Pas tout le temps. L'arrêtant à bout de bras, il ne la lâcha pas pour autant une fois celle-ci arrêté. Ses yeux plongeant dans les siens, il avait besoin de savoir ce qui la préoccupait autant. Lorsque sa soeur n'était pas d'humeur joyeuse, il ne l'était guère non plus. Et un Lorenzo pas heureux, ce n'est pas une chose à voir.

« Bordel Anna, crache le morceau, tu me rends mal à l'aise. C'est pire que lorsque tu as tes règles, et ça va me rendre parano. J'ai l'impression d'avoir affaire à une condamnée à mort. Alors à moins que tu sois enceinte ou que tu désires épouser un gars en collant, tu peux tout me dire et tu le sais très bien. »


{j'ai préféré reprendre le premier post de mon ancien sujet en le modifiant un peu, j'espère que ça te dérange pas }

Le regard tracé droit devant elle, Annalisa continuait sa course, comme si de rien n'était, comme si son frère ne la harcelait pas depuis une dizaine de minutes pour qu'elle parle et déballe absolument tout. Tout. Toutes ces raisons qui expliquaient son froid silence et sa morosité, toutes ces raisons qui pourraient surtout expliquer l'irritation palpable qui régnait depuis le début de leur footing habituel – de moins en moins habituel, d’ailleurs. Il fallait admettre que c'était vraiment rare qu'il y ait des tensions entre Lorenzo et elle, alors le moindre malaise n'était pas difficile à déceler - D'autant qu'Anna n'était pas du genre à tracer son chemin sans prendre la peine de raconter sa vie en long, en large et en travers à son frère. De même qu'il le faisait pour ses propres histoires farfelues.

Mais là, elle n'avait pas envie. Pas envie d'avoir à admettre qu'il lui manquait et que, finalement, elle n'avait jamais eu à le partager, alors elle devait s'y faire. Et quel intérêt y avait-il à tout lui avouer, comme ça, d'une seule traite? A part passer pour une sœur stupide et jalouse. Passer pour la vieille célibataire qui ne comprend pas ce qu'est l'amour , blablabla... Elle ne voulait rien de tout ça, et depuis le temps qu'ils n'avaient pas passé de temps ensemble, elle n'avait pas envie - ni le droit - de gâcher ça, et elle était bien décidée à ne pas lui répondre jusqu'à ce qu'il se décide à changer de sujet. Mais il n'avait pas l'air décidé, puisqu'il la stoppa dans sa course, tenant fermement son bras, et l'accusant même d'être enceinte!

« Mais t'as complètement craqué ton slip toi ! » Sentant le regard pesant de son jumeau planté dans le sien, elle secoua le bras pour se défaire de son étreinte, et soupira.
« Parle moi plutôt de ton dernier concert. Standing ovation ? » Bénit soit le fait qu'Anna n'ait pas pu assister à la toute dernière représentation de son frangin, qui lui permettait de le lancer sur son sujet favoris: Sa musique. Mais un silence s'installa, plus lourd encore que tout ceux qui avaient précédé, et le regard insistant de Lorenzo qui, elle le savait, ne la quitterait pas tant qu'elle n'avait pas tout déballé. Elle grimaça alors et, telle une professionnelle, sortit la moue timide et désolée qu'elle arborait sur son joli visage d'ange, dès qu'elle n'obtenait pas ce qu'elle désirait.

Avec un peu de chance il laisserait passer pour cette fois. Anna savait qu'il fallait bien qu'elle lui en parle un jour ou l'autre, mais elle aimait tout autant retarder l'échéance, peut-être par crainte que cela brise quelque chose entre eux, peut-être par peur. Stupide.
« Lorenzo... On en reparlera, tu veux? C'est vrai quoi, c'est pas comme si on avait pas tout notre temps à consacrer l'un à l'autre, enfin non, enfin si, tu vois c'que j'veux dire, mais... » Shit.

(No problemo )

Les bras croisés sur sa poitrine, il dévisageait sa sœur droit dans les yeux. Lorenzo était connu pour être quelqu'un de connu mais surtout pour être une personne très proche de sa famille et de ses ami(e)s. En l'occurrence, Anna en faisait partie. Elle avait beau nier tout mal intérieur, on pouvait facilement lire en elle comme dans un livre ouvert. Elle ne savait pas cacher correctement ses sentiments et au fil des années, Lorenzo avait su la déchiffrer correctement, si bien qu'il la connaissait sous toutes les coutures. Les coutures morales, non physiques, précisons.

« Arrête de changer de sujet ! C'est ton truc ça, éviter une conversation pour une autre. »

Les disputes entre frères et sœurs, c'est plutôt courant. Quand vous partagez la même vie pendant des années, avec des points de vues différents, c'est évident qu'à un moment ou à un autre, le clash se produit. C'est même quasi inévitable. Pourtant, les disputes entre frangins on ne pouvait pas dire que Lorenzo et Anna en connaissaient beaucoup. Être jumeaux, ça a du bon dans un sens. Déjà, quand vous êtes de faux jumeaux, vous n'êtes pas obligés de vous habillez de la même façon à peine sorti du berceau. Lorenzo aurait été fichtrement mal vu s'il avait porté une robe à fleurs et sandales roses barbie. Il aurait été directement classé dans la zone "Je fais du shopping, j'aime le rose et je suis un garçon. En gros, je suis gay". Deuxième point, vous êtes systématiquement liés. N'imaginez pas deux personnes qui communiquent pas pensée, non, mais plutôt le genre de personne qui ressente le mal chez le voisin. En gros, Anna et Lorenzo ont toujours été proches et chacun savait systématiquement quand l'autre avait un problème. Un peu une histoire de deuxième sens. Et quand Anna allait mal, Lorenzo le savait toujours même si elle disait le contraire.

« Justement non, je ne vois pas ce que tu veux dire. »

Tendrement, il repoussa une mèche de cheveux blond derrière l'oreille de sa sœur. Anna était la personne qui comptait le plus dans sa vie. Elle faisait partie de lui, c'était son sang, sa chair, sa demie-âme. Si elle avait besoin d'un rein, il lui donnerait. Si elle avait besoin énormément d'argent, il deviendrait pauvre pour elle. Si il devait mourir pour la sauver, alors il le ferait. Quand on est jumeaux, on à pas la même perception fraternelle qu'un frère et une sœur avec des âges différents. Chaque sentiment est renforcé, si bien que Anna resterait sa femme numéro une dans sa vie, quoi qu'il advienne.

« Je suis ton frère et en tant que tel, tu sais très bien que tu peux tout me dire. Et même si tu voulais me dire que tu partais vivre en Amazonie pour je ne sais quelle raison, tu sais très bien que je t'écouterais et que je te laisserai suivre ton bout de chemin. Alors là maintenant tout de suite, tu sais très bien que tu peux me dire ce qui ne va pas. Alors vas-y, je t'écoute. »